L'ESSENTIEL
Quelqu’un m’a dit – avec du miel –
Que dans mes poèmes, charmants,
Je négligeais « l’essentiel »
Et que vraiment, vraiment, vraiment...
Et j’ai baissé le nez, confuse,
Me demandant obscurément
Quel est ce crime sans excuse
Digne du plus grand châtiment ?
Qu’appelle-t-on l’essentiel ?
Et quelle est cette faribole ?
Pour moi, c’est un nuage dans le ciel,
Une hirondelle en plein vol,
C’est le ruisseau, c’est la fontaine,
Le conte « il était une fois... »
Des quatre jeudis la semaine
Ou bien la galette des Rois.
Et si je n’ai point de « message »
A vous transmettre gravement,
Pourquoi me déguiser en mage
Et feindre un terrible tourment ?
L’essentiel, c’est que ma Muse
Ne s’ennuyant ne vous ennuie,
Ni que, bêcheuse, elle refuse
De vous distraire un jour de pluie.
in « L'Oiseau bonheur »
- édition 1985
par Gilles-Claude THéRIAULT :