Pour éprouver Madame
quant à la garde d'un secret,
Monsieur a feint d'enfanter un louis d'or.
Par le biais de son séant.
Ayant peu vécu
Madame le crut.
« N'en faites point état,
insista bien Monsieur,
cela susciterait l'envie
et l'on voudrait à coup sûr m'éventrer
pour me vider les bourses. »
Mais la voisine et le vent,
dont c'était le sort,
le surent ;
et le louis d'or
en devint lingot,
sicav en hausse,
dégueulis de jackpot,
rente viagère,
et que sais-je encore.
L'on vit alors les gabelous du coin
s'emparer de l'affaire
et soumettre Monsieur à une fouille en règle.
Ayant bien joui de leur avoir montré son cul
(on a les joies qu'on peut, quand on a trop vécu)
il leur lança, ravi de les sentir bredouilles :
« Je loue fort qu'on m'ait désigné à
votre zèle,
mais si j'ai ce matin mis bas tout un louis d'or
c'est aux soins de Madame
qu'on doit le prix qu'il a atteint ce soir ! »
Et bien que l'objet fût absent de la scène
il parut fort seyant d'en taxer le renom.
Et c'est à Madame, et à elle seule,
que revint l'honneur de s'en acquitter,
au dépens de ses biens (ou de sa personne).
Et pour une fois
la voisine
n'en sut rien.
in « Fables de compagnie » édition 2010
(voir LIBRAIRIE)
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