Le Héron et le Ver luisant
parodie de « Le Loup et l'Agneau »
Ayant fait langue basse
sur tout ce qui coasse,
un héron de haut rang
s'en prit à ce qui brille :
« Qui te rend si hardi de troubler mon regard ?
dit-il au ver luisant qui vivait par hasard,
tu seras châtié d'en avoir fait fuir le songe.
Monsieur le Président, dit l'autre en clignotant,
croyez que ma lueur ne peut en rien vous nuire.
Tu m'aveuglas pourtant hier à la même heure.
Comment l'aurais-je fait
alors qu'étaient à plat mes accumulateurs ?
Si ce n'est toi, c'est donc ton ombre.
Je n'en ai point, voyez vous-même.
C'est donc quelqu'un des tiens,
qui veut briller en société.
On les avait déjà croqués ; il ne
reste que moi.
C'est donc leur feu follet.
De l'âme qui les mut ne reste aucun reflet.
Voyez plutôt du côté de la lune :
elle a de grands pouvoirs,
et sur nos nuits, blanches et noires,
règne en maîtresse.
La lune est ta Déesse...
tu paieras donc pour elle. »
Et l'un de croquer l'autre en l'accusant d'appât,
mais non sans prier Dieu de bénir le repas ;
la raison du plus fort est certes la meilleure
mais la bonne conscience aurait tort d'être ailleurs.
in « Pique-nique chez La Fontaine »
- édition 2005
par Henri NAFILYAN :
par Grégoire BOURBIER :